Syndicalisme et politique : des rapports complexes qui évoluent en fonction du contexte

L’indépendance du syndical et du politique telle que théorisée dans la charte d’Amiens peut être considérée comme un principe partagé par l’ensemble des organisations syndicales françaises même si certaines ont abandonné son contenu révolution na ire. Elles en reconnaissent toutes l’apport et l’esprit.

Elle reste une référence théorique du syndicalisme français. tiques et de l’État. Adoptée en 1906 au congrès fédéral de la CGT, elle assigne au syndicalisme le double objectif de la défense des intérêts et des revendications des salarié·es et la lutte pour la transformation de la société. Estimant que le syndicalisme suffit à lui-même, elle rappelle que son action se situe en toute indépendance des partis politique des l’État.

Elle estime qu’il est du devoir de chaque travailleur-se d’appartenir au syndicat et le-la laisse entièrement libre de participer, en dehors de cette adhésion, à toute forme de lutte correspondant à ses aspirations philosophiques ou politiques à condition toutefois de ne pas les importer dans le syndicat.

L’acceptation généralisée de la Charte d’Amiens n’est pas synonyme d’étanchéité entre le syndical et le politique. La théorie des relations entre syndicalisme et politique présente, selon le contexte et le pays, plusieurs types de relations. La subordination marque une relation à sens unique variant de «la courroie de transmission », le fameux cordon ombilical qui a tant fait débat à la CGT, à la tutelle syndicale sur le parti politique à l’image de ce qui a pu se pratiquer (et se pratique encore) dans les pays anglo-saxons (dans la tradition social-démocrate), en passant par une neutralité se concrétisant par une adhésion à l’ordre existant (à l’image de la CGC par exemple). L’hostilité est reconnaissable dans la négation d’un parti, comme l’anticommunisme est un principe fort de la création de FO. La substitution est plutôt l’apanage du syndicalisme révolutionnaire construit sur les bases de la Charte d’Amiens soutenant le combat pour des améliorations immédiates mais aussi l’émancipation future.

Le syndicalisme français a cette spécificité de procéder des deux traditions, entre rejet pour la CGT du modèle social démocrate et maintien d’une forme d’autonomie vis-à-vis d’un parti politique.

La relation syndicats/ politique s’est transformée du fait des liens qui se sont établis entre les syndicats et l’État; prenons pour exemple le rôle de la CGT à la Libération dans le domaine de la protection sociale, la Fonction Publique, puis du droit du travail. Mais l’expérience du programme commun au début des années 1970, et notamment l’affrontement PC/ PS, puis le tournant de la rigueur renforcent l’idée que le mouvement syndical ne doit pas laisser aux seuls politiques la responsabilité des choix de société.

La coopération, donnant liberté à un syndicalisme renforcé de répondre favorablement aux sollicitations de partis politiques, n’a pas connu de véritable concrétisation en France par crainte sans doute de retomber dans la subordination. L’histoire récente questionne le rapport du syndicalisme au politique dans un contexte où le syndicalisme n’a plus beaucoup de victoires à faire valoir et où une véritable perspective d’alternative politique à gauche ne se dessine pas vraiment.

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